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A l’initiative de Valérie Lescrenier, Ministre de l’Aide à la Jeunesse, une réforme structurelle du secteur est engagée, qui vise à se recentrer sur son public-cible ainsi qu’à répondre aux besoins des acteurs de terrain du secteur de l’Aide à la jeunesse, des magistrats, des jeunes et de leurs familles.
L’Aide à la Jeunesse prend en charge tant les jeunes en difficulté ou en situation de danger que ceux en conflit avec la loi[1] dans des services adaptés. Les jeunes en difficulté ou en danger sont ceux qui par exemple sont en rupture, victimes de maltraitance ou négligence familiale, exploités ou en danger dans la rue. L’Aide à la Jeunesse agit toujours en priorité sur base volontaire avec les familles pour les jeunes en difficulté et en danger, mais elle peut aussi intervenir de manière contrainte en cas d’absence de collaboration et d’une situation qui met gravement en danger le jeune. Pour les jeunes en conflit avec la loi, l’Aide à la jeunesse intervient dans le cadre de la mise en œuvre de mesures consécutives à une décision de justice.
Le secteur fait face à des défis croissants depuis plusieurs années. Conscient de cette réalité, le Gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles a, à l’initiative de Valérie Lescrenier, dégagé 9 millions d’euros supplémentaires dès 2025 pour soutenir les politiques dédiées à l’Aide à la jeunesse. Ces moyens pérennes participent à la mise en place d’une réforme du secteur qui se veut ambitieuse.
Elle vise à apporter des solutions structurelles aux problématiques identifiées, en favorisant une approche plus transversale et intersectorielle. L’objectif est d’adapter l’accompagnement, le soutien, la prévention et l’application des sanctions pour mieux répondre aux besoins spécifiques de chaque jeune.
Il est essentiel d’adopter une vision globale du secteur, en renforçant tant la prévention que l’accompagnement, afin de limiter l’aggravation des situations complexes et d’apporter des réponses plus adéquates aux jeunes pris en charge.
La réforme structurelle de l’Aide à la Jeunesse sera mise en œuvre au cours des cinq prochaines années, selon une approche progressive et cohérente
Elle s’appuiera sur trois grandes lignes directrices couvrant l’ensemble du secteur, garantissant ainsi une transformation en profondeur adaptée aux besoins des jeunes et des professionnels. Ces orientations viseront notamment à renforcer la prévention, l’accompagnement et le soutien des familles, fluidifier les parcours d’aide et favoriser la coordination entre les acteurs. L’objectif est d’assurer une prise en charge plus efficace et durable, au regard des réalités du terrain et en concertation avec le secteur.
- Une prise en charge ciblée, adaptée, efficiente et innovante qui tient compte des besoins d’aujourd’hui et de demain
Afin d’apporter une réponse personnalisée et adéquate aux situations particulières des jeunes qui nécessitent une prise en charge, il faut redéfinir clairement le public cible qui doit être accompagné par les services de l’Aide à la Jeunesse, Cela concerne tant les jeunes qui sont en situation de danger que ceux qui sont en conflit avec la loi .
- Objectiver les besoins de tous les acteurs du secteur
Face à l’évolution des besoins du secteur et aux urgences rencontrées, il est essentiel d’objectiver les attentes des structures d’accompagnement et des jeunes. Cette réflexion a été entamée lors de la législature précédente.
Un outil d’évaluation sera disponible dès juin 2025 pour mieux cerner les besoins en places. Il permettra d’adapter rapidement l’offre, qu’elle soit en accompagnement, en résidentiel, en famille d’accueil ou tout autre type de service….. L’objectif est d’anticiper les situations à risque et d’intervenir au plus tôt pour permettre, en toute sécurité pour le jeune, de le maintenir dans son milieu de vie.
Dans l’attente de cet outil, la Ministre a d’ores et déjà étendu, dès le 1er janvier, les agréments pour augmenter la capacité des services d’accompagnement intensif en famille et pérennisera, en 2026, les nouvelles places financées de manière provisoire lors de la législature précédente. Une nouvelle structure d’hébergement (SRG – Service résidentiel général) a déjà ouvert ses portes fin 2024, permettant d’accueillir 15 jeunes, de la Province du Brabant Wallon et de Région Bruxelles-Capitale, cette dernière faisant face à une pénurie plus criante de places disponibles en résidentiel pour les jeunes en danger.
Par ailleurs, une étude de l’Université de Liège sur la complexité des prises en charge sera présentée avant l’été, et une recherche avec l’Institut National de Criminalistique et de Criminologie (INCC) analysera l’évolution de la délinquance juvénile pour affiner les stratégies de prise en charge et les outils à disposition des magistrats pour les jeunes en conflit avec la loi.
- Initier une nouvelle offre de prise en charge : les accueillants professionnels en famille
Certains jeunes font face à des besoins particuliers et ne trouvent pas leur place dans une structure existante, soit résidentielle soit en famille d’accueil.
Sous la précédente législature, SOS Villages d’Enfants s’est vu confié une recherche exploratoire ayant pour objet une comparaison des différents modèles existants. Des rencontres avec les acteurs de terrain ont également été réalisés en vue de formuler des propositions d’implémentation d’un modèle de « famille d’accueil professionnelle ». Ce rapport aboutira dans le courant du mois de février.
Il s’agit, via cette nouvelle offre de prise en charge, que sont les accueillants professionnels en famille, de créer une réponse nouvelle et complémentaire pour des besoins particuliers. Le cadre en sera défini en concertation avec le secteur et les organisations syndicales afin de répondre précisément au besoins identifiés qui ne peuvent aujourd’hui être pleinement rencontrés.
- Mieux orienter les mineurs en conflit avec la loi
Les mesures de prise en charge des mineurs en conflit avec la loi reposent sur trois modèles : protectionnel, restaurateur et sanctionnel qui appliquent chacun en leur sein des mesures graduelles et hiérachisées. Face à la pénurie récurrente de places dans certaines structures d’hébergement, il est essentiel d’objectiver les besoins tout en optimisant l’utilisation des dispositifs alternatifs existants.
Cette problématique sera étudiée sous l’angle d’une meilleure utilisation des outils et mécanismes existants mais également du travail mené au niveau de la transversalité avec les autres compétences. Certains jeunes ne peuvent par exemple, actuellement, être transférés dans des structures correspondant à leur profil après un passage en IPPJ, ce qui contribue au manque de place dans ces structures.
Tout acte commis en infraction à la loi appelle une réponse adaptée. Celle-ci doit être personnalisée et s’inscrire dans un cadre qui associe responsabilisation, sensibilisation aux conséquences des actes, développement de l’empathie et gestion des émotions. De nombreux jeunes en conflit avec la loi sont aussi des mineurs en situation de vulnérabilité, que ce soit sur le plan personnel ou dans leur environnement.
Pour cela, la collaboration sera renforcée avec les magistrats afin de leur offrir les moyens de déterminer rapidement la solution la plus adaptée pour chaque mineur en conflit avec la loi, en tenant compte de la nature et de la gravité des infractions commises.
- Redéfinir la prise en charge des MENA
L’Aide à la Jeunesse intervient dans la prise en charge de Mineurs Etrangers Non-Accompagnés (MENA) qualifiés de mineurs en danger. Un MENA, n’est pas, de par son statut, un mineur en danger, une prise en charge par l’Aide à la jeunesse s’opère décrétalement dans le cadre d’une aide complémentaire et supplétive, qui intervient si l’enfant est en difficulté ou en danger. Face à l’afflux important du nombre de MENA dans notre pays fin 2015-début 2016, le Gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles, tout en réaffirmant le caractère supplétif de l’aide à la jeunesse quant à l’accueil des MENA, a décidé que, de manière humanitaire et solidaire, le secteur de l’Aide à la jeunesse pouvait apporter son savoir-faire aux solutions à identifier pour assurer aux MENA un impératif accueil respectueux de la dignité humaine et de leurs droits.
Conformément à la Déclaration de politique communautaire « le Gouvernement poursuivra l’accueil de MENA particulièrement vulnérables dans le cadre d’une nouvelle convention « plan MENA ». Le caractère complémentaire et supplétif de l’Aide à la jeunesse sera réaffirmé par une participation accrue de FEDASIL » Des discussions seront donc menées avec FEDASIL afin de reclarifier l’apport de l’Aide à la jeunesse au regard de ces missions complémentaires et supplétives, et ce, afin de permettre de se recentrer sur son public cible , qualifié de mineurs en danger
- Une nécessaire transversalité et intersectorialité pour personnaliser la prise en charge
La prévention générale relève pour partie de la jeunesse mais également d’autres secteurs (logement, santé, emploi, enseignement, culture, sport,...), quant à la prévention éducative spécialisée, elle relève spécifiquement de l’Aide à la jeunesse.
L’optique de transversalité doit être la norme au sein de la Fédération mais également avec les autres entités. Il est fondamental de proposer des prises en charge adaptées aux besoins spécifiques des jeunes, tant au niveau des soins quand c’est nécessaire, qu’au niveau du travail éducatif. Cela implique une nouvelle approche de l’accompagnement et une nouvelle stratégie de prise en charge tant en ambulatoire qu’en résidentiel.
Des concertations sont déjà menées. Un premier pas a été franchi avec le secteur de la Santé, du Handicap en Wallonie avec l’annonce de la création d’un dispositif novateur, cette année, via une unité de crise résidentielle co-financée par les secteurs au sein d’un bâtiment de l’AVIQ situé dans la Province du Brabant wallon. Cette intersectorialité sera renforcée.
- Des procédures claires pour un accompagnement efficace : simplifier, soutenir, accompagner
- Réduire la charge administrative
Les services agréés et les familles d’accueil font face à une inflation des charges administratives. Chacun, tant au niveau des services de l’Aide à la jeunesse, que des familles, doit pouvoir se recentrer sur sa mission de base qui est d’accompagner les jeunes. Cette complexité est, en outre, une véritable entrave à la motivation de nombreuses familles de s’impliquer dans l’accompagnement des jeunes qui rencontrent un parcours de vie plus difficile. Il s’agira par exemple de faciliter le remboursement de frais, l’accès aux crèches,…
- Renforcer et soutenir le personnel de l’Aide à la Jeunesse
Qu’il soit agréé ou public, le personnel de l’Aide à la Jeunesse assure un métier particulièrement utile auprès des jeunes mais également prenant émotionnellement. Ce personnel joue aussi, et souvent, un rôle phare et référent dans la vie des jeunes concernés.
Il bénéficiera de formation et du renforcement de la supervision afin de faire face à la charge mentale qui est la sienne. Près d’un million d’euros en 2025 y seront consacrés. Cela permettra une meilleur articulation de la charge de travail par un renforcement du soutien hiérarchique par exemple. Plus de 70 ETP (équivalent temps plein) supplémentaires seront créés afin de pérenniser et renforcer le personnel encadrant des SAJ (Services d’Aide à la jeunesse), SPJ (services protection de la jeunesse) et IPPJ (Institutions publiques de protection de la jeunesse) soit 4 ETP seront consacrés à l’inspection, 34,5 pour l’accompagnement et l’encadrement des jeunes et familles en IPPJ et 33 en SAJ/SPJ.
Il faut également renforcer l’attractivité de ces métiers, en facilitant les engagements et en promouvant la mobilité au sein des services dans la fonction publique pour assurer un cadre d’encadrement complet mais également de permettre au personnel de mieux s’épanouir dans son parcours professionnel.
- Renforcer l’accompagnement et le soutien aux familles
La qualité de l’accueil des jeunes sera renforcée par l’augmentation de la norme psychosociale. L’encadrement psychosocial au sein des Services Résidentiels Généraux et des Projets Educatifs Particuliers assimilés, qui a déjà été renforcé lors de la législature précédente passera à 1 ETP psychosocial pour 15 jeunes (+0,25 ETP). Le but est d’améliorer de manière substantielle le travail avec les familles pour favoriser le retour du jeune dans son milieu de vie quand c’est possible. Cela pourra permettre de limiter la durée des placements, ce qui aura pour effet d’augmenter le nombre d’enfants annuellement accueillis hors de leur milieu de vie.
Enfin, la qualité des prises en charge sera également renforcée par la création d’un « Référentiel de qualité » à l’instar de ce que connaît l’ONE, qui devrait être finalisé en fin d’année 2026. Centré sur une qualité de prise en charge identique et optimale dans toutes les structures d’accueil, il sera progressivement implémenté tant dans le secteur public que privé.
- Clarifier les procédures d’adoption pour le bien-être de l’enfant
Une clarification des objectifs et des procédures d’adoption est nécessaire pour atteindre l’objectif initial de l’adoption qui est d’aider les enfants qui en ont besoin. Il faut faire correspondre le secteur de l’adoption aux nouvelles réalités et aux besoins des enfants pour lesquels elle est envisagée.
Une réforme en marche : des premières mesures en place dès 2025
La réforme structurelle de l’Aide à la Jeunesse s’inscrit dans un plan quinquennal visant une transformation en profondeur du secteur. Toutefois, dès 2025, des mesures concrètes seront mises en place afin d’amorcer le changement. Cette première phase permettra d’engager les dynamiques essentielles et de mettre en œuvre certaines actions prioritaires. L’ensemble des acteurs sont mobilisés pour assurer une montée en puissance. La réforme est donc déjà en marche, portée par une volonté d’amélioration continue et d’adaptation aux réalités du terrain afin de répondre aux besoins, somme toute, urgents du secteur et des jeunes.
Cette année marquera le lancement de l’outil d’évaluation des besoins visant à initier le processus d’ouverture de nouvelles places dans les structures qui le nécessitent en 2026. La qualité de l’accueil sera renforcée grâce à un soutien psychosocial accru, favorisant, lorsque cela est possible, un retour plus rapide en famille. La valorisation et le renforcement du personnel constitueront également une priorité. La mise en place du dispositif de familles d’accueil professionnelles débutera avec une première phase de recrutement en 2025, afin d’accueillir les premiers jeunes dès 2026. En parallèle, le profil des bénéficiaires de ce dispositif sera défini en concertation avec le secteur. Enfin, une réflexion sera engagée afin d’assurer une meilleure articulation entre la sanction et les outils mis à disposition des magistrats pour la prise en charge des mineurs en conflit avec la loi.
Valérie Lescrenier, Vice-présidente et Ministre de l’Aide à la jeunesse : « Le secteur de l’Aide à la jeunesse nécessite une attention particulière. Il englobe autant les jeunes en difficulté ou en danger que ceux en conflit avec la loi. Il est impératif d’analyser les procédures et structures en place de manière approfondie pour définir les lignes directrices qui permettront de mieux anticiper l’avenir. L’urgence ne peut pas être la règle, ni pour les jeunes, ni pour les travailleurs du secteur. Nous devons sans attendre répondre présents pour celles et ceux qui ont besoin d’accompagnement et de soutien dans leur parcours de vie et leur apporter des solutions. De nombreux besoins ont été identifiés et exigent des réponses rapides. Nous redéfinirons l’Aide à la jeunesse à travers une réforme structurelle, afin d’accompagner plus efficacement les jeunes tout en intégrant l’ensemble des acteurs concernés. Il est essentiel d’offrir à ces jeunes un avenir porteur de perspectives en les soutenant lorsqu’ils en ont besoin. »
[1] Au 1e mai 2023, 94% de jeunes étaient pris en charge parce qu’en difficulté ou dans une situation de danger, 5% de jeunes pris en charge parce qu’ils étaient en conflit avec la loi et 2% pour ces deux motifs cumulés.